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« En direct de Gaza » suivi de « Une espérance dans la souffrance » 

envois de Gaza ville le 7 août 2015

mercredi 12 août 2015, par Ziad Medoukh

{} Aller directement à « En direct de Gaza » suivi de « Une espérance dans la souffrance » de Ziad Medoukh.

INTRODUCTION CIRCONSTANCIÉE : La mairie de Paris contre sa propre majorité — celle qu l’a donc élue — a prévu sans la prévenir l’organisation d’une journée invitée, dédiée à « l’ambiance festive de Tel-Aviv », le 13 août 2015, dans le cadre de Paris-Plage.
Inutile de revenir en détail sur l’horreur qui l’an passé frappa les habitants et l’infrastructure de la Bande de Gaza pendant le ramadan, tous s’en souviennent. On peut toutefois rappeler que la suite de l’offensive « Bordure protectrice » restée inachevée, dû à la réaction internationale qui força au cessez-le-feu, néanmoins s’acheva en 2014-2015 par la violation majeure du cessez-le-feu pour réaliser la « zone tampon » grignotant davantage le territoire de Gaza à la frontière égyptienne, en entamant la destruction d’une grande partie de la ville de Rafah ; ceci grâce à la collaboration de l’armée d’Égypte qui assuma le relais des bombardements pour épargner Israël des protestations internationales, et ce qui laissa silencieuse la communauté internationale, en effet.
Enfin, comme Ziad Medoukh nous l’apprend sans délai dans sa page facebook, chaque fois qu’il le peut, des bombardements sporadiques poursuivent de frapper Gaza et ses habitants, alors que pas une maison n’a été reconstruite, et l’électricité et l’eau potable manquent la plupart du temps, dans ce vaste camp ruiné resté enclos et sous embargo
Ailleurs, la colonisation s’est accélérée dévorant le désert comme les derniers lambeaux de territoires palestiniens, et partout les forces d’occupation règnent par la violence, blessant, tuant, humiliant, incarcérant — inclus des membres officiels du gouvernement palestinien, telle Khalida Jarrar, membre du FPLP élue au Conseil législatif palestinien, qui loin d’être libérée au terme de six mois de détention arbitraire vient d’apprendre la reconduction de sa peine décidée par un tribunal miliaire...
Cette année le ramadan palestinien fut caractérisé par le déferlement de hordes d’extrémistes sionistes hostiles aux musulmans à Jérusalem Est, où l’armée d’occupation pénétra dans la mosquée Al-Aqsa ; des pogromes par des colons eurent lieu en Cisjordanie occupée, dont l’incendie criminel de la maison où un bébé fut brulé vif et sa famille grièvement blessée (voir l’information sur le portrait procuré par l’auteur)... Les assassins arrêtés le sourire aux lèvres sont aujourd’hui libérés, faute de preuves, alors qu’il y a deux jours l’armée menant l’enquête auprès des voisins fouilla leurs maisons et emporta tous les témoignages documentés [1]. Un jeune étudiant de 16 ans, Laith Khaldi,, fut tué par balle sous le feu de la répression militaire, lors de la manifestation de protestation contre ce pogrome.
Un jour avant l’horreur cisjordanienne ce furent six jeunes israéliens poignardés par un Israélien même, intégriste créationniste, lors de la Gay Pride de Jerusalem, parmi les victimes duquel une adolescente de 16 ans, Shira Banki, décéda des suites de ses blessures le 2 août.
Tel-Aviv où, comme le faisait remarquer un élu politique français sur les réseaux TV hier soir, la plage est généralement survolée par les avions qui vont bombarder Gaza.
Il serait donc particulièrement grossier de nier la violence israélienne instrumentée par le statut de son pouvoir militaire sur les territoires palestiniens, en disant que la population de Tel-Aviv se trouverait dans une bulle désinformée des actes du gouvernement et ignorerait, après les manifestations fascistes armées contre les manifestants pacifiques qui l’an passé demandaient l’arrêt de la guerre, largement communiquées dans la Presse nationale de l’État hébreu, de même qu’après la violence de l’attaque contre les jeunes de la Gay Pride cette année, qu’une partie de la population pût commettre des actes fascistes et liberticides admis par 70% de la population (selon les militants israéliens pour une paix juste et durable), et protégés par l’establishment et les ministres de la justice et de la défense (tous les deux affilés à un parti d’extrême droite), d’un gouvernement non seulement raciste et colonialiste mais en tout état de cause qui viole habituellement les résolutions de l’ONU et le droit international.
D’ailleurs, il y a trois ans, quelques mois avant l’opération « Pilier de défense » contre Gaza, le journal israélien Haaretz informait que les artistes de Tel Aviv ne voulaient plus être la vitrine d’Israël, et déclarant que Tel Aviv ne pouvait plus être considérée comme une bulle exempte des exactions gouvernementales d’extrême droite et racistes. On trouve une recension en français de cet article dans le magazine Courrier international du 18 juin 2012...
On sait qu’une grande partie de la population française est directement et dialectiquement concernée tant par la question de la Palestine que par l’État d’Israël ; il semble donc étrangement naïf ou irresponsable d’avoir imaginé possible un tel évènement sans avoir préalablement consulté la majorité élue ni l’ensemble des partenaires associatifs contradictoires pour évaluer l’opportunité d’une telle fête. Une tribune de Julien Salingue, dans le journal Libération du 11 août, dit clairement l’installation politique d’un tel évènement.
Cependant, l’appel au boycott par les organisations palestiniennes démocratiques, seule action non violente possible, s’élargit partout dans le monde [2].

Une bonne nouvelle : pendant que nous préparions la publication de ces deux textes de Ziad Medoukh, pas tout à fait inédits puisque provenant de facebook et indexés dans le site Palestine Solidarité [3], mais avec son accord, nous avons appris que l’ensemble de ses poèmes avait reçu le diplôme d’honneur du Prix de l’édition des Européennes-europoésie 2015 attribué dans la section « francophonie » le 16 mai dernier ; dans le même cadre, il est également lauréat du premier Prix de la francophonie, pour la seconde fois.

On peut lire l’entretien de Anouk Guine avec Ziad Medoukh publié dans L’Humanité du 21 avril 2015 : « Ziad Medoukh : « À Gaza, on résiste pour exister et on existe pour résister ». (L. D., le 11 août 2015)


 



En direct de Gaza, le 7 août 2015 à 22h 46

L’armée israélienne bombarde Gaza et blesse quatre palestiniens.
Les avions militaires israéliens ont mené deux raids sur différents lieux dans la bande de Gaza ce vendredi 7 août 2015.
C’était dans les villes de de Nussirat et de Burij au Centre de la Bande de Gaza.
Quatre personnes ont été blessées lors de ce bombardement israélien, dont une dans un état grave.
L’aviation israélienne a bombardé de nouveau la bande de Gaza en plein été, une région toujours sous blocus israélien inhumain.
L’armée israélienne viole presque tous les jours l’accord du cessez le feu et ne respecte pas la trêve.
Le gouvernement israélien d’extrême droite veut provoquer les factions de Gaza.
Rien ne semble changer pour les Gazaouis un an après la dernière offensive militaire israélienne en été 2014.
Blocus, bombardements, agressions, incursions, souffrance, blessés et martyrs.
Devant le silence complice de cette communauté internationale officielle,
Et devant l’absence des médias étrangers qui occulte cette réalité,
Gaza résiste, existe et vit !
Gaza la courageuse défie l’occupation !
Gaza la vie persiste !
Gaza sous blocus patiente !
Gaza la dignité garde toujours espoir !
Gaza la déterminée continue de s’accrocher à la vie !


 


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Une espérance dans la souffrance


Sans fin,

Les jours succèdent aux jours,

Les saisons aux saisons.

Tristesse perpétuelle et effroyable réalité.

Pleur dans l’obscurité de la douleur,

Fracas du feu.

Sang,

Larmes et vacarmes des armes.

Montagne de ruines perpétuelle sur une terre insalubre,

Une terre éternelle accrochée au flanc des collines.

Souffrance d’un peuple qui déchire le cœur d’une pierre.

Familles entières brisées.

Interminable spoliation d’une population digne.


Outrages, déshumanisation et injure faite à des innocents.

Barbarie humaine qui a dépassé ses limites.

Une abomination et un acharnement de la part des extrémistes

Ces criminels impardonnables sans cœur et sans pitié

Aux yeux aveuglés par une haine insensée.

Qui sèment la mort et la désolation,

Qui font lâchement couler le sang des bébés

Et les bruler vifs dans les bras de leurs mères


Des enfants à l’âge de l’innocence et de l’insouciance,

Fracassés par une guerre barbare

Et une cruauté absolue et inqualifiable ,

Subissent l’assassin colonialiste dans leurs berceaux

Au milieux des jouets éparpillés,

Sans qu’un cri ne sortît de leurs lèvres.


Silence assourdissant devant ces massacres incessants.

Résolutions jamais respectées par les colonisateurs.

Des médias qui restent dans le superficiel.

Un monde qui se complait dans une neutralité incompréhensible

Et qui continue de se plier devant leur chantage.

Voir nos enfants mourir devient normal pour la planète

Sans que les assassins soient attrapés et condamnés

Planète où la paix est tristement amputée,

Où la culture d’impunité domine !


On fait basculer les valeurs fondamentales de l’humanité.

Trop d’horreur et trop de haine.

Trop de racisme abjecte et de grands crimes.

Une plaie au cœur des solidaires atterrés et dévastés,

Avec leurs larmes de sang et leur indignation

Qui essayent de consoler les opprimés,

Sans voix devant l’innommable.


En dépit des exactions, les causes justes vaincront,

Le rayon de soleil brillera,

Et le rameau d’olivier surgira

Car nos âmes sont pleins de sagesse.

C’est dans la grisailles des jours naissants

Que s’enfuient les promesses de lendemains éblouissants

Et la face lumineuse de l’humanité

Fait ressortir sa force obscure !


Le dynamisme et la ténacité d’un peuple debout

Sont une victoire !

Face à l’impitoyable injustice de l’occupant,

Courage et obstination de ce peuple privé de tout,

Volonté intacte et farouche de lutter contre la folie meurtrière,

Pugnacité unique de transcender l’horreur en beauté.

C’est un sourire radieux qui combat pour la vie, sans armure.

C’est un esprit de résistance intacte qui n’a pas reculé d’un pouce.

C’est un flambeau pour que renaisse enfin la paix.


Palestine , face aux outrages du temps qui file, résiste.

Palestine, face à la parodie burlesque des droits de l’homme, existera.

Palestine, face à la conscience atrophiée du monde, vaincra.

Palestine, avec sa force vitale, gagnera.

Palestine, avec l’espoir chevillé au corps, vivra.

Palestine , dans la nuit du monde et dans l’espérance,

Affirme sa foi dans l’avenir de l’humanité,

L’espérance d’une nouvelle aurore aux mille soleils étoilés.


© Ziad Medoukh le 7 août 2015


Avec nos remerciements.


La source des photos est Ziad Medoukh lui-même ; elles composent l’iconographie originale qui accompagne respectivement ses deux envois.

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Le bébé en portrait est Ali Dawabcheh, 18 mois, martyr brulé vif à l’aube du 31 juillet dans l’incendie criminel de sa maison familiale par des colons, à Douma au sud de Naplouse, au nord de la Cisjordanie. Son père Saad Dawabcheh est mort à l’hôpital des suites de ses brulures le 7 août. Son frère de quatre ans et leur mère dans un état grave sont toujours hospitalisés ce 11 août.

Retour à l’Introduction 

P.-S.

NDR : Message de France aux amis de Gaza et de Cisjordanie, un dessin du grand dessinateur Tardi, transmis en version intégrable par Dominique Grange, via sa page de facebook, et qui ne pourrait dire mieux ce que les français solidaires dont je suis pensent du fond du cœur. Il est possible de le partager largement depuis la légende. (L.D.)




Voir dans L’humanité la réponse de Jacques Tardi — sur la polémique provoquée par son dessin.

[Mise à jour du 17 août : suppression du lien de la pétition pour l’abolition de l’événement du 13 août puisque sa date est prescrite]

Notes

[2] Voir le message vidéo de Haidar Eid, sous-titré en français, dans le site de BDS France

.

[3L’index de l’ensemble accessible des analyses et poèmes de « Ziad Medoukh, Palestinien, responsable du département de français à l’université Al Aqsa et coordinateur du Centre de la Paix de Gaza » est à cette page (suivre le lien).

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