La Revue des Ressources
Accueil > Création > Poésie > Un poème surréaliste

Un poème surréaliste 

mercredi 21 novembre 2012, par Norbert Barbe

AVERTISSEMENT :
Qui pourrait être suprématiste, si l’on pose la relation des côtés telle que le carré de α, qui l’élève exponentiellement, le transforme en λ (démultiplication cancérigène qui se propage de l’objet traitant à la chose traitante), lequel additionné au carré de x, la Personne, qui est toujours une inconnue, correspond à la puissance de l’hôpital où on l’infuse. Ce qui se représente, mathématiquement, par la formule suivante : α2 + x2 = Le Caducée au Carré, ou encore : λ + x2 = Ж2.



"Dans votre labyrinthe, il y a trois lignes de trop - dit-il enfin -. Je sais d’un labyrinthe grec qui est une seule ligne droite. Sur cette ligne se sont perdus tant de philosophes que peut bien se perdre un simple détective. Scharlach, lorsque dans un autre avatar vous me donnerez la chasse, feignez (ou commettez) un crime en A, puis un second crime au point B, à 8 kilomètres de A, puis un troisième crime en C, à 4 kilomètres de A et B, à mi-chemin entre les deux. Attendez-moi ensuite en D, à 2 kilomètres de A et C, encore une fois à mi-chemin. Tuez-moi en D, comme maintenant vous allez me tuer à Triste-le-Roy.
La prochaine fois que je vous tuerais - répondit Scharlach -, je vous promets ce labyrinthe, qui est composé d’une seule ligne et qui est indivisible, incessant.
Il recula de quelques pas. Puis, très attentivement, il fit feu.
"
(Jorge Luis Borges, "La Mort et la boussole")



PERSONNAGES :

L’infirmière ALPHA Cadre qui est toute seule
L’infirmière LAMBDA Qui n’encadre rien
Le patient individuel Ulysse ou PERSONNE
Le monstre de LOCKE Des patients en bloc/Qui s’accommodent et se disloquent
Le médecin PANCRÉAS Qui se prélasse
Le Dr. PRATE Qui s’épate
KNOCK Société Anonyme
CHOEUR GREC Un plus

POÈME EN DEUX ACTES, et Six Tableaux, dont le Quatrième contient Deux Scènes.

Indications scéniques : Tabl. 1 : sur l’air de "Les Flamandes" de Jacques Brel ; Tabl. 2 : sur l’air de "Nationale 7" de Charles Trénet ; Tabl. 3 : sur l’air de "Ignace" de Fernandel ; Tabl. 4, Sc. 1 : sur l’air de "Le Téléphone" de Nino Ferrer ; Tabl. 4, Sc. 2 : sur l’air de "La Solitude" de Léo Ferré ; Tabl. 5 sur l’air de "Scorbut" d’Hubert-Félix Thiéfaine ; Tabl. 6 : sur l’air de "Ah ! les salauds !" d’Aristide Bruand.

ACTE PREMIER :
À L’HOSPICE
Lieu de vie qu’ils disent
Où les vieux on l’analyse
Tristes Anchise
En toute franchise
Paient cher du personnel les vices
Et les sévices

TABLEAU UN :
De l’Infirmière Numéro Un/ Araignée du matin/ Qui chacun/ Comme la catin/ Chagrine chagrins/ Couvre en commun

Dans l’hospice
Efficace édifice
Où veillent les varices
Une unique Eurydice
Vieille Elfe
À coiffe de COFAL
L’Infirmière ALPHA
Qu’a’la dit Cadre
Sû’ si l’e’ si seule
Elle encadre
Linge et linceuls

TABLEAU DEUX :
Des malades malheureux/ Privés de médecin même véreux

Surveille son ombre
Des patients en nombre
Quatre fois l’alphabet grec
Qui s’accommodent et se disloquent
En monstre de LOCKE
Jusqu’à ce qu’engagés dans ces hygiéniques gogues
Qui à force en eux forge la nouvelle vogue
De l’amour à la morgue
Le régiment agglutiné compact bloc
De leurs corps ensemble choque
Comme dans le cimetière proche
Sous les acerbes crocs acérés de Cerbère qui les croquent
Les os qui breloquent
Dans un rock
Vidé de défroques
De l’épi de la vie à l’orge de l’orgue
De l’horloge
Élogieuse églogue

TABLEAU TROIS :
Du véreux qui en roi/ Vit de consultations qu’il ne fait pas/ Paresseux matois/ Qu’à l’hospice jamais l’on ne voit

Pendant ce temps-là se prélasse
Relativement relax
Le médecin PANCRÉAS
Qui délicieusement se délasse
En choisie chaise Starck
D’où il repasse
Rapace
Et ressasse
Vorace
L’ensemble plié des liasses
Qu’en masse
Il amasse
Et il repart à la chasse
De juteuses jobardes JOCASTE
Dans son hospice de standing surface
D’exquis espace
Il y a toujours des places

ACTE DEUX :
À L’HÔPITAL
Dernier val
Sur le Calvaire des maux et du Mal
Pour le Dormeur sous épineuse péridurale



TABLEAU QUATRE :
Avant la pancarte/ De l’hôpital/ Qui n’est que
lastre / Et que ladre/ Où l’on arrive mal/ Et ne sort qu’en FUNERAL

Scène Première :
DE PERSONNES À PERSONNE : Du patient qui n’est personne/ De l’hospice à l’hôpital où pareil on l’abandonne/ Jusqu’à ce que son heure enfin sonne/ Et que sans que personne ne s’en étonne/ Un lit il libère pour une autre personne


Le Patient DOE
Pas Dodo l’enfant Do
Juste Jane ou John
A bien de la chance
S’il a une chambre
Pour lui seul
Et un téléphone
Bien que personne
N’entend quand il sonne
L’immeuble est immense
Ses membres
Bras pieds jambes
Coeur foie rate
Donations potentielles
Immobile meule
Tendu sur la toile de sa paillasse
Sans égard
Les varices violettes
Virent escarres
Où qu’il regarde
Aucune trace
Des félices et facétieuses faces
Qu’avant il reconnaissait comme camarades
Finie son errance
Enfuie l’enfance
Nécessairement il est sûr
D’avancement rance
À outrance
Pour la Camarde
Son corps est maintenant mûr
Vieille épluchure
Pourrie l’interne structure
Terne tournée toute la texture
Coeur découvert de pelure
Corps par le ver vermoulu suppurant par sur
Mâture nature
Depuis devenue dur
Pleine vue sur le futur
Il se meurt
De la mort
Arthur,
Où t’as mis le corps ?
Supplice des séquelles
Maintenant malade
Il tombe en transe
Et c’est en ambulance
Qu’à l’hôpital
Sans pitié on l’emballe
C’est ainsi que sa stance
Inopinément s’est faite aubade

Scène seconde :
DE PROVENANCE, RENAISSANCE ET RUTILANCE EN RÉPUGNANCE, VIGILANCE ET ROUSPÉTANCE, ET DE CONFIANCE, CONSTANCE, CONTENANCE ET VAILLANCE EN DISCONVENANCE, INSIGNIFIANCE ET INSOUCIANCE : De l’arrivée en ambulance/ Et de la découverte en transe/ De l’uniforme/ Hôpital informe/ Où le patient/ Impatient/ Mais sous surveillance/ Jouera dans la souffrance/ Solitaire sa subsistance


Dans sa cage
D’hôpital
Singe
En nage
Le patient passe la page
La vie extirpant son âge
Numéro irrationnel et inconnu
Il n’est que peu courtoisement attendu
Par l’infirmière LAMBDA
Et se lamente en l’incessante lambada
D’allées et venues
Sans que sa voix porte
Au-delà de la porte
Derrière laquelle on l’apporte
Ou l’emporte
Peu importe
Il pleure geint rechigne et exhorte
Sur son matelas Epeda
Carte Vitale
En carcérale
Terminale
Cloacale
Et viscéral
Urinal
Médications palliatives
Lui ordonnent
De modernes KNOCK
Pour qu’il vive
Transformé à présent en partie du monstre de LOCKE
Au moins jusqu’à ce qu’arrive
La nonne
Sacram unctionem infirmorum
ut a peccatis liberatum
Et fleurisse et foisonne
Le sanatorium

TABLEAU CINQ :
La pancarte en papier ou en zinc/ Où s’expose en prose et mots de sot qui sont si en soucis et de dingue/ Comment ici tout se décompose et se déglingue/ Et où l’on voit que dans un tel bastringue/ C’est toujours le patient qui trinque

PLACARD INDICATIF
Formant écart digressif
Et explicatif
Des règlements normatifs
Et des actes captatifs
Du gouvernement associatif
Et caritatif
Du collège constitutif
De l’ordre organisatif
De l’hôpital hyperactif
SUR LA RAISON D’ÊTRE DES SOINS PALLIATIFS
(Visible sur le mur informatif
De l’entrée des soins intensifs
Et qui vaut en tant que recours législatif
Pour tout postérieur chantage émotif
De familiers dépressifs
Contre le personnel destructif
Mais dont l’immunité est un mal électif
D’effets estimatifs
Que l’institution décide de voir d’un oeil dépréciatif
Car aucun organisme ni dispositif
Ne peut fonctionner sans directifs)

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

Chaque arrêt décisif
Chaque tort disjonctif
Chaque barbarisme désassertif
Chaque pronostic aperceptif
Tout diagnostic évasif
Toute prescription d’apparents desideratas oblatifs
Mais produit d’un zèle hâtif
Et limitatif
Toute belle ordonnance au contenu superlatif
Mais de résultats subjectifs
Tout oubli accumulatif
Enfin toute imposition sans motif
Rendue par la vindicte d’un joug abusif
Faite au malade poussif
Sans recours défensif
La souffrance le rendant inoffensif
Tel Lascif
Nourrisson passif
En mélancolie aux effets nocifs
Qui son frais tempérament fait lénitif
Trouvent ainsi c’est itératif
Dans le collectif
Idiolecte administratif
Médicatif
Le procédé abrogatif
De n’être vu négatif
Et recevoir un très créatif
Additif
Voile explicatif

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

C’est ainsi que dans le vocabulaire extensif
Des carabins poncifs
D’art tristement offensif
Non inoffensif
Pour chaque crasseuse bourde ou primitif
Quiproquo qui des bouffons leur mériterait les distinctifs
Des pitres le pif
Il y a toujours impératif
Un adjectif
Au savant nom rectificatif
Interprétatif
Rétroactif
Explicatif
D’incompétence défaut récessif
Revendicatif
Mots sportifs
Substantifs
Suggestifs
De talents tardifs

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

Topiques supplétifs
Fixatifs
Fédératifs
Drogues ou potions aux résultats évolutifs
Est-ce que ça vous chatouille,
Ou est-ce que ça vous gratouille ?
Roboratifs
Sédatifs
Siccatifs
Spéculatifs
Évaluatifs
Exhaustifs
Exclusifs
Expansifs
Explosifs
Expéditifs
Excessifs

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

Face au patient plaintif
Client craintif
Pansé pensif
Affectif
Afflictif
Incompréhensif
Et Appréhensif
Chagrin chétif
Hâve sans havre obsessif
Toussif
Compulsif
En quête de soins moins agressifs
Alternatifs
Défendeur défensif
Face au canif
Scalpel putatif
De la Serpe Symbole facultatif
De la faculté de la Faculté des Médecins méditatifs
Qui pratiquent proactifs
Admirables Docteurs TULP intéroceptifs
De soi admiratifs
Sur le vif
Et sur les Vifs

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

Si le client meurt positif
C’est qu’il était maladif
Ne soyons pas dubitatifs
Ni évaluatifs
Soyons attentifs
Compétitifs
Illustratifs
Instructifs
Et inductifs

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

Le sens commun en est affirmatif
Le masque compréhensif
Et le secret occlusif
L’hermétisme corporatif
Rendent cohésif
C’est un caractère persuasif
Et un mérite perspectif
Le groupe corporatif
Du monde curatif
En cet admirable répétitif
Effort coercitif
Pour ne jamais être connu comme causatif
Des maux de patients trop peu combatifs
Le pleur commémoratif
Est ce qu’il propose aux parents plaintifs
Il faut être effectif
D’autres morts attendent leurs respectifs
Justificatifs

CHOEUR GREC :
Digressif
Agressif
Transgressif
Supplétif

Son travail est fondamentalement énumératif

CHOEUR GREC :
Palliatif

Quant à moi cher Collègue
Quoique je m’en émeuve j’allègue
Que si un malade décède
Rien là à récriminer au remède
C’est d’abord qu’il était en mauvaise santé
Ensuite qu’il n’a pas fait attention
On ne peut soigner les gens contre leur volonté
Même avec la meilleure intention

TABLEAU SIX :
Du chirurgien et sa milice/ Qui ne peuvent rien à rien mais pareil insistent et misent/ Sur la mort ou la vie jeu pour eux roulette russe et lice/ Où ne survit que rarement la mise/ Le patient qu’il méprisent/ À leurs faciles bavures et
Oups si bêtes méprises


Le Docteur PRATE
Chirurgien vasculaire
Qu’a un air
Fort militaire
De sa voix débonnaire
S’étonne
Se gratte
La tête
Vraiment
Ça l’embête
Et s’épate
Sous le ventre qui le flatte
Et sous ses célèbres pattes
Roulées rouflaquettes
Qu’hypocrite Hippocrate
Pédant il porte
Fieffé et fier
Artaban de Parthes
De l’état désastreux
Où on lui apporte
Le malheureux
Mais il n’y a plus rien à faire
Néanmoins il l’opère
C’est conforme
Aux normes
Ça concorde
Concrètement
Avec quotes
Et contentieux
De l’hôpital
Il faut bien payer les fins de mois
C’est normal

Puisque nous sommes aux jours gras,
Il n’y a pas de danger de parler grassement

Des lits pour les grabataires
Qu’est-ce qu’on ne ferait-pas pour son prochain
Encore que
Pensant-le bien
Celui qui meurt cette année en est quitte pour l’an prochain

FIN DU POÈME
Et mes souvenirs faisandés
ADAGIO
SANS GODIVEAU
ET tombe le RIDEAU
Ce Très Désastreusement
POÈME SURRÉALISTE
Est Entièrement Dédié Aux :
C.H. de Cannes ;
Hôpital de Fontenay-le-Comte ;
Hôpital de Luçon ;
Maisons de Retraite :
La Cigalière À Cannes
Et Jean Dehon À Mougins ;
UDAF-Vendée ;
UDAF-Nice ;
CLICS de L’Hermenault
Et de Sainte-Hermine ;
Députés de la Vendée
Et Sénateurs de la Vendée ;
Préfet de Vendée
Et Préfecture de Vendée ;
Présidence de la République ;
Et, le dernier mais non le moindre, Au :
Juge des Tutelles
De Fontenay-le-Comte

P.-S.

En logo une oeuvre de TRENTON DOYLE HANCOCK :

Descension and Dissension, 2008

Mixed media with collage

96 X 96 inches

sur le site suivant.

© la revue des ressources : Sauf mention particulière | SPIP | Contact | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0 | La Revue des Ressources sur facebook & twitter