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VORTEX - 2/3 

livre 2/3 : QUATUOR (comme une avancée lente du temps et des formes)

lundi 26 juin 2023, par Lionel Marchetti

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Photographie © Lionel Marchetti - 2023

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VORTEX

Je sais, maintenant, descendre vers le jour
André du Bouchet

Interstices où la vie se révèle
François Cheng

Vortex — livre 2/3 ¨ ° 7 poèmes

1/3

3/3

QUATUOR
(comme une avancée lente du temps et des formes)

Concert du quatuor lgbs

Marie Schwab, alto
Soizic Lebrat, violoncelle
Anouck Genthon, violon
Patricia Bosshard, violon

1.

LA SOUPLESSE

Je suis là
pour qu’un vent se lève
il vient

Poème sioux

Accepter de s’abandonner au récit
et, bien sûr, à la mélodie

Timbres acquis, aimés, façonnés
bientôt laissés là
oubliés
pour une avancée de chaque geste
— inspir et expir — depuis la matière qui s’érige

Cette abstraction

Une prise (au sens de frayer avec l’animal)

Désormais : la souplesse

La mélodie, seule
au-delà de la mélodie

Sorte d’entité qui parle d’un ailleurs
des profondeurs
de ce qui a été, de ce qui vient

Ce qui est là

Si l’on écoute le monde

La mélodie, bloc dur parfois
complexité
mais aussi poche de densités, accumulation
de quelques fragments

Éclats

La mélodie se détache
elle surgit
se manifeste souplement
et
simplement

Sans avoir été ni imposée
ni décidée.

2.

CAPACITÉ DES FIGURES

Chaque œuvre d’art développe une loi.
Mais ce n’est pas avec cela que l’on commence.

Claude Debussy

La décision, en aucun cas, appartient à la capacité des figures

S’extirper, quitter la gangue
s’ouvrir et respirer

Tentation naturelle de la chrysalide

Le centre du rayonnement, l’expansion
d’une noblesse

Connaître

L’impératif, pour la main
du tissage — guérir

Les yeux fermés, le silence du son

Cette bascule au sein même de l’immensité
toutes les échelles se combinant

La concentration

Voici, désormais, qu’il est possible de renverser tel ou tel obstacle
de s’en affranchir
de rejoindre les espaces vastes

S’orienter, se perdre, laisser le vent siffler

La chute d’un arbre
est-ce une mort ?

Rivière, méandres entourés de falaises et de forêt

Lecture de Lalla :

Qui peut empêcher l’eau de se figer sous le gel ? [1].

L’existence d’une ligne
— un horizon — une ligne autre
bientôt pliée, cisaillée, presque dissoute
enfin revenue à son horizon de ligne

Jusqu’à n’être qu’un point.

3.

BRIS, BRISURES

Ne découvre pas.
Il est possible qu’il n’y ait rien sous le voile. Et rien
ne se recouvre à nouveau.

Antonio Porchia

Les pierriers, l’inscription sonore de chaque pas

Respiration et brisures

Texture, tissage, brèche

Éclats

Sol
et
brisures

L’entier de cette matière prend possession

Le gel, l’érosion tout autant

Une entaille

Cette avancée lente du temps et des formes

Depuis l’incendie ; et non pas depuis cette petite boule en dedans (construction souvent infâme, parfois nécessaire, prétendent-ils)

Une passe, un passage

L’ouverture.

4.

L’AILE

La véritable tradition, c’est maintenant.
Éric Baret

Le froissement, un bruit, l’envers même du pliage ou de la contraction

Une aile posée sur l’air

L’aile — notre alliée

Ala

Le A, retourné
est un corps d’homme, de femme
femme et homme, bras relevés
pour appeler

Et non pas tête animale

Des énergies hautes
circulent

Une érotique de sons et de formes
jouissant du grand rapport entre ces forces

Le corps de l’oiseau

Un corps de couleurs liquides.

5.

LE CERCLE

Une voix
je vais l’envoyer
écoutez-moi

Poème Omaha

Orbe, orbis, cercle

Inanité galopante, œil noir, contagion dont il faut se méfier

Cette envie (une nécessité)
de lancer plus loin — jusqu’à rejoindre l’incandescence — quelques paroles
contre les mots

Des lianes, bien sûr

Le végétal

Et voici cette très grande forêt, voici cet espace où grandir, croître, prendre de l’essor

Lorsque l’intention, plus qu’esquisse
—  aucun procédé, aucune posture —
ouvre sur un espace neuf

Les yeux du dedans cheminent depuis ces cavités innombrables

Le mouvement, la précision des mouvements

L’adaptation constante à ce qui se présente

Et n’est-ce pas du présent, justement, dont-il s’agit ?

6.

DU DEHORS

Pour voir la vie, il faut être à l’écart. Le point lumineux
n’apparaît que lorsqu’on se tient en dehors.

Bram Van Velde

Cette façon infernale de toujours vouloir saisir
lorsque l’on ne considère le cheminement que comme un unique survol

Ne pas attendre, être à l’ouvrage

Ce qui constitue tout être, ses ramifications

Ni front contre front (tel l’animal)
ni pour obtenir quelconque assentiment, ni même pour cette prétendue vérification

Seulement un contact
aux limites
sans trop en avoir conscience — à l’instant du contact

L’errance, elle aussi, est de la partie

Voici la haute exigence

L’espace est plein, l’abstrait n’existe pas.

&

7.

ŒIL NOIR

Qui pénètre dans la roche dure perd la dureté de la roche
et trouve la sienne dans la roche dure.

Antonio Porchia

Le grand serpent des énergies
plusieurs têtes
(frères et sœurs)

Sœur
et
frère

S’abstraire, savoir user de la retenue

Cette noblesse dansée

Celle-là même qui accepte, en toute maturité, de s’incliner face à ce qui est

L’abstrait n’existe pas
le réel
que l’on respire
est lumineux et sans mystère

Quand bien même, depuis cet œil noir
— immense —
la question, toujours
reste posée.

2/3

…/…

1/3

3/3

P.-S.

quatuor lgbs

UNE photographie — UN poème / © Lionel Marchetti - 2023

Notes

[1Lalla, in Chants mystiques du tantrisme cachemirien, trad. Daniel Odier, éd. Points Sagesses, 2000, p. 58.

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