Acétabule
Le désir fend
s’aspire
comme une ventouse
escamote le vin
dans une acétabule
à mesure que le vinaigre prend
Le plaisir dort
se love
rouge et fauve
dans un calice
se moque
acide
du trop-plein
que l’on jette
dans l’enfonçure
Bloc-notes
Pas de demi-mot
Ni de semi désordre
Plus rien à sa place
Cumul explosif
de vouloir en modules
Éclaté par un rien
sans voix qui bredouille
on se vide à l’endroit
Envers et contre tout
Vidé de multitude
au reflux mais si flou
de bidule en bidule
un devoir coagule
Sans possibilité
Sans signifié du tout
Souffle désordonné
Rien que du semi-mort
et rien de superflu
Devoir en servitude
Concours continuel
Disperser les formes
et décrocher l’appel
de mon bloc-notes
Chaos
Quand la couleur
vibre de nœuds
qui serrent
Tout semble gris
dans le chaos
Terrible mort
que ne rien dire
au cœur du bruit
Terrible mort
que ne rien faire
au seuil de l’acte
Quand tout se sent
dans le chaos
Tout se retient
de parole
Quand tout appelle
au sort du monde
accablé
qui se lève
Dans l’inouï
Le temps nous a perdu
Dans notre histoire,
y a tous nos aperçus,
nos immobiles,
Le temps nous a reclus
et puis,
il s’est éperdu dans l’inouï,
dans l’inouï
Ma peau contre ta peau,
mes os contre tes os,
mes yeux dans tes yeux
c’était pareil au même
au bord du ciel qui fuit.
L’amour nous démarque
Il fait de nous des perles grises
Le temps, c’est vrai, nous dégriffe
et nous griffe
Encours
voir à rebours ce qui ne se retourne pas
faire le tour de tout
sans retour possible
retourner comme un poids-lourd
entendre sourd ce qui ne se répète pas
mettre au four fait-tout
sans recours possible
contourner sans demi-tour
être insensible à ce qui ne revient pas
se tenir debout
sans toujours possible
caresser sans trop d’amour
presser le pas
passer la peau sous la paume
recompter
sans arrêt sans vouloir
l’encours de soi qui coule
s’empresser sur le départ
jusqu’à la mort qui tourne.
Evasique
Evasique
tu soulèves l’écume scélérate
pour rechercher le sens
courant sous la carcasse
tu vomis le vin picrate
à ras du corps de la mélasse
tu gémis de voix qui gratte
pour entamer l’essence
errant sous la surface
Evasique
tu cherches et cherches encore
le fardeau froid qui mord
coincé dans tous tes murs
de l’évasion qui suinte
au détour de bricoles
Evasique en vain
ce mot soudain ne se définit plus
même il ne finit plus
comme un lieu de fonds
en long et au large de l’espace
infini d’évasique
Evasique
tu cherches et cherches encore
mot de passe-passe
tu relèves la brume disparate
qui va et vient si peu loquace
ce mot si vague
de vanité qui va
sans fin ni loin
finit dans la vase
vague vase vaseuse
qui va et vient sans bornes
croisant de grands espaces
infinis d’évasique
Hypnose
(chaos sur retour)
Quand les couleurs s’emmêlent et
vibrent de nœuds
qui serrent
tout tremble au temps
de l’hypnose
A l’intérieur
tout semble gris
dans le chaos
Quand le miroir s’en mêle et
courbe des nœuds
çà serre çà serre !
tout semble long
dans la narcose
De l’intuition gravide
au souvenir
tout se mélange à l’intérieur
tout semble faux
tout tremble aussi
dans le cachot
Tout se vide
en
chaos
La jalousie
Enfermé je ne suis
cloîtré sous le volet
qui s’ouvre et se referme
en caché du dehors
profilé de l’abord
en accès transparent
le corps débobinant
l’extérieur en attente
écarquillant le bord
il se prend d’incessants
aller-retours grinçants
de cintrants soupiraux
enfermé je ne suis
mon cœur se rabattant
de panneaux décalant
l’ouverte jalousie
La chute
Tous, nous tombons d’une femme.
Le corps diminué,
affaissé sous notre propre poids,
on choit sous le sein,
par le bas.
Mélanger les couleurs
porter haut les têtes en rangs
comme des panneaux
plein plein plein plein plein
plein de panneaux peints
mais pas de rien
pour dessiner.
Pas question de céder
ni de baisser la garde
chaud l’en-tête en sang
plein plein plein plein plein
plein d’idées
mais pas d’espace
pour les rêver.
Tu sens le sol courbé
séduit sous le nombre
en victime passagère
plein plein plein plein plein
plein de portes
mais pas de sol
pour les passer.
Tu te prends pour l’oiseau fou
sujet libre de l’enseigne
et sans plaque à l’écusson
plein plein plein plein plein
plein de pattes
mais pas de vol
pour te porter.
Sortir par le bout de la chute
s’écrouler sous son propre corps
fléché de quatrièmes dimensions
plein plein plein plein plein
plein de sortes
mais pas de clocher
pour t’indiquer.
Remparts percés de parts en parts
éclatés de trappes à planches
en panonceaux particuliers
plein plein plein plein plein
plein de tout
mais rien de vrai
pour rassurer.
La mort est une femme
dont le corps est un sein
tout mélangé de soi
tout mélangé de tout.
Tout dans le vitrail
choit par le bas.
La limite
Lorsqu’on est brisé
jusqu’au socle
qui se fend
S’il n’y a plus que des mots vides
des alignements dociles
de sons
de lettres
poèmes décharnés
qui se cognent
à mort
à la ligne
du sens au pied du mur
on ne peut rien dire
Lorsqu’on est brisé
qu’on se rend
dilué
à la limite
L’abîme
« Tous les yeux sont gris la nuit ! » me dit l’homme de quart
formateur en ophtalmocharcuterie.
L’oeil dans la pénombre,
capteur dynamique de cônes sans caps.
La voix de cordes vivantes
observées sous le voile,
débitant l’ambitus à zéro,
faits de boucherie vocale.
Le contrôle induit sous l’accéléromètre,
sans référentiel astronomique,
faits-divers dont on ne sait plus rien.
Le corps sans amer,
transversal omis
sous la dérive mobile,
en fin de course,
qui s’abîme dans l’abîme.
Je déduis à l’estime une improbable position,
sans plus de loi fondamentale,
sans filtre fort transmis de rien,
route profilée par les carrefours vibratoires,
désorienté sous l’angulaire,
reliquat de mécanique,
à la force nulle,
qui s’abîme dans l’abîme.
Sous l’effet d’inertie, je divague
des objets fluides,
au moteur parfait,
sans plus de symbolique,
qui s’abîme dans l’abîme.
« Tous les yeux sont gris la nuit ! » me dit l’homme de quart.
Sous l’effet d’inertie, je divague
les coordonnées d’un brouillard,
qui s’abîme,
dans l’abîme.
Labyrinthe
Labyrinthe
je me perds
dans la spirale
dallée de verbes
tortueux tracés
de pierre sans limite
de terres et de lignes
en vaines conjectures
au fond du puits
Labyrinthe
je me perds
dans le rhizome
tressé de verbes
sinueux lacés
de lierre stalagmite
de mers et de signes
en vaines fermetures
au fond du puits
sans répit
je calcule à la somme
des sous-ensembles de strates
des puissances de lieux
des racines zoniques
au fond du puits
sans répit
à l’appui du chiffre
je calcule en vain
des géométries oubliées
des produits de non retours
sourds à l’équivoque
au fond du puits
sans répit
à l’appui du chiffre
le corps usé
je calcule au quantum
de caleuses hypothèses
noueux dénoués
dans le dédale
puis
de méandres en culs-de-sac
sans plus besoin de nombres
j’atteins la finitude
et la mort
me retourne
au fond du puits
le labyrinthe
Le gouffre
L’âge offre un pauvre sort
vautré dans le confort
ou transi dans la rue
parce que tout
tout pour nous tous
est vain.
Parce que.
Parce que tout
quoi que l’on fasse
quoi que l’on chasse
est vain.
Parce que tout
tout nous engouffre.
Parce que.
On se bat sans relâche
et parfois l’on se goinfre
occupé par un rien
désœuvré d’un peu tout
puis le temps nous malaxe
il nous mâche et remâche
on s’empiffre de choses
et puis tous
on étouffe
on finira taiseux
malade ou vaniteux.
Nous sommes toujours seuls
si seuls au fond du gouffre.
Parce que.
Le marchepied
Au pas du marchepied
presque plus de piétons
de passants devant moi
survivants du passé
mort dans l’arêne
à la marche forcée
Au pas du marchepied
presque plus de passants
se pressant devant moi
terrifiant défilé
lieux qui s’enchaînent
à la marche forcée
Au pas du marchepied
Je dis un impossible
imaginé de trop
au gré de mon vouloir
exclusive théorique
Au pas du marchepied
Je me plains du possible
en écrasé de plus
épris de non-vouloir
résignation pratique
Au pas du marchepied
je tente une échappée
à la marche forcée
exclusive
et cynique
Le mur
sans laisser-passer
rien que ce mur
ce mur pure injure
mur
qui te prend tout
qui te condamne et qui serpente
ode à l’horreur à la laideur
tombeau cruel qui se lamente
aveugle et sourd
aux hommes blessés
sous les portiques
mur
passe la terre
au laminoir
balafre immonde et barbelée
mur de convois de prisonniers
peuplant la mort sous la paroi
burin qui bat chemin de ronde
œuvre à glacis sur insulaire
sans laisser-passer
pas de frère, pas de mère
rien que ce mur
ce mur pure injure
mur
qui te prend tout
qui te dévore et qui sépare
en écraseur en diviseur
prison sans faille et sans espoir
aveugle et sourd
aux torturés
sous hermétique
mur
passe la terre
au laminoir
terrible mur qui met en pièces
un espace gris sans architecte
une agression par le couvercle
mur de casseurs et d’oppresseurs
ouvrage ouvert aux bulldozers
sans laisser-passer
pas de frère, pas de mère
pas de soeur, pas de père
rien que ce mur
ce mur pure injure
mur
qui te prend tout
qui te dépouille et qui t’enterre
comme un voleur un kidnappeur
triste barrière en son cratère
aveugle et sourd
aux humiliés
de l’historique
mur
passe la terre
au laminoir
clos qui défile imperturbable
peuple asphyxié sous stratifiés
corps emmurés sous l’olivier
clos pour bétail dans les tranchées
plan découvert à la frontière
sans laisser-passer
pas de frère, pas de mère
pas de soeur, pas de père
pas d’avenir pas de terre
rien que ce mur
ce mur pure injure
mur
composition de l’ombre
aggloméré de chair
ton peuple découpé
meurtri sous la clôture
ton pays confisqué
enlisé cadenassé
dépecé fragmenté
imprimé dans le roc
fort à fendre taillé dans le choc
sous la maille de la cloison directe
barrière à blockhaus qui se moque
de la taille de l’expansion suspecte
ce mur pure injure
panorama
étouffé
sous le poids
ce mur
pure injure
brise infranchissable
file une armure
de déchirure
de bétonnière
avec tes pierres
ce mur
c’est la guerre
Le prisonnier
Il faut faire demi-tour.
Allez, le prisonnier !
Encore un gros effort
Mais tu peux boire encore
Tous ce faux rhum est bon
quand il est bu d’un coup
et qu’il te saoule à sec
et rend ta mort muette
Le monde entier se meurt
enrubanné de murs
de clés qui calent à crans
d’obstacles continus
Allez, le prisonnier !
Encore un gros effort
On peut tout agripper
puis tout illusionner
tout brillantiner
tout calamistrer
Même
on peut tourner en rond
unis dans le cloaque
et penser qu’on en sort
Même
on peut dessiner l’amour
Allez, le prisonnier !
Encore un gros effort
On peut penser sans grille
et sans carrés de lois
mais c’est toujours un rêve
un songe éberlué
Mais tu peux boire encore
nous sommes des conscrits
car ce qui nous attend
au bout du corridor
çà nous importe peu
quand nous chantons
quand nous aimons
quand nous pleurons
mais le pourquoi du nous ...
Mais tu peux boire encore !
Sous le béton qui crie
les graffiti du sol
nous entendons de loin
la vie craquer d’en-bas
Uniformisé sous l’instant
de reproduction mimétique
un autre soi nous parle
en mandat de forçat
La vérité c’est qu’il n y a pas
qu’il n’y a jamais
de
demi
– tour
Il y a seulement
le négatif
l’instantané de la réplique
Epreuve au contretype
il n’y a plus rien d’unique
et tout le monde a peur
devant son grand miroir
Tous des reclus de plus
dans un amas de gens
nous nous ressemblons tous
nous dispersant nous-mêmes
Des prisonniers coincés
bouclés sous le boîtier
Rien que des pauvres corps
capturés de cellules
Tous sommes dans la prison
Coincés comme en bocal
dans le filet du bagne
assommés sous le joug
Condamnés par le jour
calés dans un caveau
comme un poisson pêché
bâillonné dans l’air chaud
Des pendus de leur ombre
asphyxiés par la nuit
expiant
rien du tout
le simple fait de vivre
L’entonnoir
Quand on est seul avec
soi-même
perdu dans l’entonnoir
Le temps se tourne et nous retourne
sur le fond
on fait le mort
Quand on est seul avec
la vie
noyé dans un siphon
Le corps en nous qui se défait
réveille à la volée
le cerveau froid tout décrépi
Quand on est seul
vient la musique
et le long chemin
qui nous repêche
à la volée
Impasse
Hélas
au loin
dessus les grands mirages
Amas de peur qui baigne
encombre les tissus
d’issus de soi qu’on saigne
aux sombres aperçus
Deviner
tout bas
devant de faux-espoirs
au loin
L’impasse et la cassure.
Elle tremble aussi d’erreur
aimant sous le murmure
enivré de fureur
Deviner
tout bas
devant de faux-espoirs
au loin
Vomir en vain l’épure
errant sous le passe-passe
en sombre pourriture
et des déments desseins
Projeter
au loin
dessus, les grands mirages
dessous, la carapace
Les captives
dans la ville
derrière les angles morts
des toits et des tours
hanté de corps
sous pesanteurs
et sous les ponts
la lourdeur et le plomb
le pesant poids du plomb
dessous les règles d’or
des murs des égouts
séché des eaux
sous projecteurs
embobiné de son
de câblage et de fil
de filant fil futile
devant des grands décors
du grand du métal
pesé bâti
sous les hauteurs
illuminé de cris
de lumière et de brique
imbriqué brac-à-bric
en-dessous des grands carrefours
des bris des déchets
désert de fer
sous l’atomique
encastré dans le bruit
d’éternelle argentique
aux perçants cris d’usines
dans la ville
chromée de laideurs ductiles
au son du nombre
séquestré dans des racks
des ombres captives
survivent
Rebelle
impression
sur l’exit
mes sens au pied
de pauvres lettres
ablation
sans transit
circuit plain-pied
de périmètres
autour du rond
l’accusation
du disque froid
seul sur ce front
la rébellion
montre du doigt
Zodiaque
Phénix et grande ourse
en fond de miel astral
le ciel illustré
je vole et vois les cieux
dans des grands parcs
Zodiaque à la source
en équilibre instable,
épreuve en cliché
je vogue à vau-le-feu
sur les grands arcs
comme un fantôme une illusion
j’éteins tout le grand jeu
un sombre alunissage
en équilibre instable,
à l’ombre du mirage
comme un zombi de ses fictions
dehors du nébuleux
je sors
de ces surimpressions
de ces constellations
Sur les nénuphars
défaits des dessinés
du bleu concentré
s’affole en mélodieux
dans les ressacs
Sur les grands drakkars
reflets tout rapiécés
du sol magnifié
s’envolent tous les adieux
dans les tic-tacs
Circulaire
inlassablement,
du crépuscule à l’aurore,
et de l’aube à la nuit,
ils dévalaient des pentes incertaines,
sculptaient leurs parcours,
circulaire
circulaire
circulaire,
imperturbablement,
du nord au sud,
et d’est en ouest,
ils poursuivaient le nombre,
construisaient la masse,
circulaire
circulaire
circulaire,
Ils se faisaient confiance
pour gagner l’avantage
et prendre un peu d’avance
frères si grands,
unis dans le sang,
déterminés pour le monde,
circulaire
circulaire
circulaire,
soumettre à la force des foules,
sous les balles de fusils,
à coups de pelle et de pioche,
soulever des montagnes jusqu’aux forts,
renverser la peur
et la passer sous la scie
circulaire
circulaire
circulaire,
inlassablement,
du crépuscule à l’aurore,
et de l’aube à la nuit,
circulaire
circulaire
circulaire.
Grise permanente
Aujourd’hui je pars.
Aujourd’hui je pars
sculpter la route,
la grise permanente,
affolée sur la carte.
Je reprends mon chemin
sans prendre le nord,
ni le centre au zénith,
sujet de déroute.
Aujourd’hui je pars.
Je démarre à l’aurore
ébloui par le sol,
les yeux rémanents,
regard du doute.
J’ai repris mon cœur
concentré sur la ligne,
le ruban pavé,
pas de parcours.
Je suis l’itinéraire
signe extérieur obtus,
bord qui rigole,
sur l’angle mort.
Je me sors par les pieds
suspendu par le bas,
sentier qui se vautre,
sur la passerelle.
Je pars.