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Une nuit à belleville 

jeudi 11 janvier 2007, par Alexandra Bougé

Je regarde le temps qui explose à l’infini

des bulles à tout va

il s’oxyde puis et lâche (ou blute) des gouttes

du temps des histoires de l’eau

pour un peu je lui cracherais

j’ai le vent en poupe

pour un bon bout

le temps qui se sépare ;

il s’amène fara încetare et s’emballe il m’amène au bout

j’amène des objets, je ramène ce qu’il aime

les gens regardent à peine le temps
s’étire

les gens s’en emparent ;

il sape le temps mon temps est fini

et j’ai le vent en poupe

et l’on se prépare au combat

les rues sont calmes les gens passent chinuiti, se chinuie ;

les gens passent

dans les rues on morfle

on passe dans les rues, calmes

on morfle, les rues sont calmes

les gens amènent, ils amènent des restes

on morfle les rues, les gens marchent, le vent en poupe, on marche ... dans les
rues

les gens n’aiment pas

ils marchent,

on s’mène tous pour délirer un coup...

les gens s’amènent

ils m’embarquent

on s’amène dans les rues calmes

on s’amène dans les rues, on regarde par les deux bouts

dans les rues les gens morflent,

ils me prennent par les deux bouts

sur l’asphalte mouillé de ton sperme

qui vont dans le camp de mon enfance

qui mouille le trottoir déshabillée, habillée

sur le trottoir mouillé de ton sperme (ou : pénétré sur la route)

au trottoir mouillé de ton sperme

enculée, enculée

tu l’as remise dans ton pantalon

et j’ai remis ça

avec des clients de passage pour un peu de sous

j’ai remis ça

je la lui rentre et la lui sort pour dix sous

j’ai la braguette dans le nez la nuit le jour "comme tu veux" je suis la pute de
belleville

la nuit le jour, je mords des queues, là je suis toujours là

j’ai belleville dans la peau

nuit et jour je me balade, je fais la pute

je fais la pute dans belleville avec des clients de passage.

dix balles la passe je fais la pute à belleville je leur prends les sous pour un
bonheur

je morfle des queues, ils me font mal,

par une nuit solaire

dans un intrînd la nuit je me fais peur

je me fais sauter pour trois balles seulement

la nuit belleville ronfle.

les gens marchent dans les rues on est mort la rue les gens prient

on y va

les rues de belleville les gens ont peur on marche dans les rues, belleville est
frageda on s’attend à pire

belleville est morte

les gens viennent la rue est calme

on fait le trottoir à belleville

on morfle,

la rue

les gens morflent, on morfle, on regarde la rue les gens sont morts

la rue est vide

la lune est livide les gens se pâment

la rue est livide, les gens, la rue est livide

la nuit est livide

les rues sont calmes

les rues sont amovibles, les rues sont calmes on s’came, les rues s’calment

j’ai trois roues et de la came j’ai de la merde dans mon sac, t’en veux ?

belleville est rance belleville est rance

la rue est chaude,

les gens morflent, la rue est livide belleville est chaude

les putes se font rares tout le monde chez soi, Belleville dort

la rue est calme là l’aurore les putes se font rares,

la nuit est blême, les routes sont autoferrées,

elles sont calmes

la route est une pute la route se pâme

la nuit est blême la nuit de belleville, la rue est blême la route est blême

belleville morfle et la nuit est blême, les rues comptent leurs morts

la nuit est calme

la nuit est blême, belleville est morte

la rue est livide, les rues se pâment

les nuits à Belleville

on morfle dans les rues

on marche, les rues sont calmes, les rues livides, la nuit blême,

la rue est vide

la nuit belleville est morose

belleville est morte

la rue est blême.

belle les gens morflent

les gens morflent,

on passe, on coupe, elle a le visage blême

la nuit est morte

la nuit est belle sous les coups

belleville la morte

se pare de son voile irradiant

la nuit est tumultueuse la nuit est morte

la nuit morte

on morfle, la rue est blême

la rue est morte

les gens se pâment sous les coups, regard révulsé

la femme est blême sous les coups ; la rue est livide, les gens morflent, les
gens se pâment, la rue est livide la rue est livide ;

elle est livide ou blême

les années passent ; la nuit se asterne sur belleville

la nuit se asterne sur belleville

la nuit était livide, la route est livide ; les routes sont coupées, elles
irradient

la rue est blême les routes irradient d’un rouge incandescent ; la route est
noire à belleville

la nuit est blême

elle est incandescente.

la route est calme ; la nuit est brève dans ses pantalons,

je regarde la nuit qui passe, elle embarque Belleville diaphane

il la baise

belleville regarde la nuit

et une fille

la nuit est une belle fille, elle est livide, les gens se pâment, et la nuit est
déserte

on ramasse les morts

belleville la terne

belleville se pâme elle lèche le trottoir

la nuit passe ; belleville est livide,

la nuit amène son lot de consolations

la nuit noire est une morte sous son voile diaphane ; belleville irradie
dans une maison de santé enfermée

belleville est morte

se pâme sous les regards étrangers

la rue est livide, belleville est sous la mort ; les gens marchent dans les rues

les gens se pâment les rues sont désertes par cette nuit du meurtre ; par cette
nuit de meurtre

les gens sont partis loin

belleville mène la danse

la rue est livide,

belle ville est morte les gens ont pris la fuite la nuit est blonde ; la vie
rasufla à la surface ; la nuit est livide, les nuits n’ont pas de fin, dans
belleville âcre ; belleville se pâme, la ville est blanche la nuit est blême ;
la nuit est diaphane ; les rues dans belleville sont mortes, belleville est
livide, les rues de belleville sont livides

les rues sont livides, les gens morflent, la nuit est déserte, la route est
livide, les routes livides, s’éclate ils morflent, les gens morflent Belleville
morfle c’est calme la nuit

la nuit se pâme les gens s’amènent, belle est vide, la nuit c’est calme à
belleville

les rues de belleville sont calmes la rue de belleville,

la nuit est blême ; livide, la nuit est blême,

la nuit est blême, la nuit blême

la nuit est de glace, les gens s’éclatent

la route de belleville est calme, la nuit, diaphane, la nuit est diaphane ;
la route est livide
cette nuit est de fer
la nuit est diaphane, cette nuit est de glace ; la nuit est blême ; la nuit est
calme,
la nuit dans la belleville

les gens sont blêmes, les routes sont cassées la came se spulbera

la route on regarde la route

la nuit se déchire

belleville est blême

la nuit se déchire

les gens marchent la nuit ;

la nuit est belleville ; la nuit est limpide ; belleville est calme la nuit
belleville est à feu et à sang, la nuit belleville était calme

la rue est livide,

la nuit est livide, la nuit est livide

la nuit est calme, les gens sont livides

les routes sont violettes les sous-routes sont diaphanes ; les gens sont
livides, la route est blême

les routes sont coupées, les gens morflent, la rue est vide

dans les rues de belleville, les gens chantent, les gens regardent la télé, ils
marchent blêmes dans la rue,

les rues sont des impasses,

la nuit les gens marchent

P.-S.

- fara încetare : en roumain se prononce “ fara înnetchétaré ” : sans cesse
- chinuiti, se chinuie : en roumain se prononce “ quinouïtzi, sé quinouié ” :
torturés, se tourmentent
- un intrînd : en roumain se prononce “ oune innetrînede” : un renfoncement
- frageda : en roumain se prononce “ fratgeda” : tendre
- se asterne : en roumain se prononce “ sé acheterné” : se pose
- rasufla : en roumain se prononce “ rassouffela” : respire
- se spulbera : en roumain se prononce “ sé spoulebera” : poudroie

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