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Eric Rohmer, Claire, et la collectionneuse 

lundi 11 janvier 2010, par Robin Hunzinger

Avant de devenir cinéaste, Éric Rohmer rêvait d’être écrivain. Son ambition fut contrariée, mais sa passion pour la littérature ne l’a jamais quitté et a nourri tous ses films.

Etudiant à Jussieu en cinéma, je courais à la Sorbonne voir Eric Rohmer donner des cours de Cinéma. Avec Jean Douchet, Bernard Cuau et Jean Rouch, il a fait partie de ceux qui m’ont donné envie de faire des films.

Gamin, j’avais vu "ma nuit chez Maud" dans un cinéma de Saint Germain, avec Claudie, ma mère.

Longtemps mon père m’a parlé du genou de Claire, comme d’un objet du désir impossible. Lorsqu’il m’a montré ce film, je me suis mis à aimer l’arnica, à rêver de caresses à l’arnica.

Le synopsis du film via Wikipédia : A Annecy, aux alentours du lac, lors de ses dernières vacances de célibataire, Jérôme, un attaché culturel de 35 ans, se découvre fasciné par une jeune fille, Claire. Il ressent un désir irrépressible de toucher son genou...

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Rohmer : "Je me suis mis à aimer le cinéma quand je me suis aperçu qu’il pouvait exprimer des sentiments ambigus".

Rohmer : "Mon intention n’était pas de filmer des événements bruts, mais le récit que quelqu’un faisait d’eux."

Rohmer confesse : "Je me suis mis à aimer le cinéma quand je me suis aperçu qu’il pouvait exprimer des sentiments ambigus."

"Les personnages de Rohmer croient qu’ils savent tout, or il y a des choses qu’ils ne voient pas. "Pendant qu’ils agencent leur propre intrigue à l’insu de leur partenaire, celles-ci se livrent à une occupation analogue avec un inconnu", écrit Bonitzer.

"On ne ment pas assez souvent au cinéma", écrit Rohmer, qui va se faire un plaisir d’orchestrer des films où un homme ment afin d’exercer une emprise sur un autre, et où des hommes et des femmes se mentent l’un à l’autre..."

A 17 ans, je ne pensais pas encore au mensonge.

Je suis tombé amoureux d’Haydée Politoff.

Haydée Politoff, à la fois bimbo et lolita, s’offre avec nonchalance à Daniel Pommereulle (dans son propre rôle d’artiste mondain) et à Patrick Bauchau.

Je cherchais des photos d’elle que je collectionnais dans un cahier. Bref, j’étais tombé amoureux d’une actrice qui était devenue secrètement mon idole.

Car, à Colmar, dans cette jeunesse alsacienne, la Collectionneuse avait inventé (pour moi) l’art de l’amour au soleil.

Haydée, c’était bien mieux que Brigitte Bardot. C’était une autre icône.

Le synopsis repris sur Wiki : Adrien s’apprête à passer une partie de l’été dans la villa provençale de Rodolphe afin d’assister, soi-disant, à une vente et de traquer un commanditaire pour sa future galerie de peinture. Mijanou, son amie, s’envole pour Londres. En réalité, Adrien va surtout tenter, avec Daniel, un peintre reconverti dans la fabrication d’objets, une quête du néant par le biais d’une profonde inactivité. La présence inattendue de Haydée déplait à Adrien qui craint de voir sa tranquillité troublée.

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En 1967, Claude-Jean Philippe se réfère à un texte d’André Breton pour illustrer le propos de La Collectionneuse, d’Eric Rohmer :

"Est-ce du Rohmer ? Il n’y manquerait même pas la référence à Goethe. Non, c’est du Breton, celui de L’Amour fou. Étrange rencontre. Car enfin, le sujet de La Collectionneuse est là tout entier.

Haydée s’identifie à la nature. Son nom est écrit en vert au générique. Alors que Daniel est en jaune ( « un certain jaune ») et Adrien en bleu. Dès lors, le premier prologue revêt un sens primordial. Haydée longeant la mer, déliant les apparences de sa démarche égale qui révèle en unifiant. Le front de mer se découvre semblable, inscrit sur la page d’aube, bleue et grise, le front de la jeune fille enferme je ne sais quel secret. Tout est neuf en ces images imitées de l’antique. Nul sentiment d’adoration ni d’horreur. C’est-à-dire absence d’un érotisme, au moins immédiat. C’est le ton de l’éloge, mais qui n’exulte pas. Le découpage ne vise qu’à préciser le sentiment d’admiration : nœuds des genoux, saillie des omoplates, finesse, grain de la peau. Beauté du tout comme de la partie précieusement cernée. A première vue c’est l’enfance de l’art, l’enfance du regard. Mais c’est une enfance retrouvée au bout du raffinement et de l’épure.

Donc, Rohmer nous donne d’emblée le regard juste. Dès les premières images, l’œuvre est dénouée, c’est-à-dire heureuse. Il lui reste à se nourrir d’inquiétude, mais sans se départir de cette première et souveraine vision. « L’homme de la rue et le philistin, écrit Rohmer, vouent à la beauté un culte dont on a tort de mésestimer la ferveur. C’est avec la culture, souvent, que débute l’indifférence. » Daniel et Adrien, produits ultimes de notre civilisation et de notre culture, entrent en scène. Rohmer leur oppose Haydée comme objet de connaissance. Mais il se propose, les ayant précédés, de poursuivre également sa recherche. Ayant connu, il s’agit de reconnaître. (...) On ne peut que louer Rohmer d’avoir choisi Adrien, Daniel, Haydée, tous trois d’aussi belle venue, et de leur avoir laissé toutes leurs chances. La part qu’il prend à leurs jeux n’est pas de complaisance ni même de complicité, elle est de pur et simple intérêt."

Noël Herpe écrivait en 1998, dans un papier que j’ai découpé dans Libération : "Il y a tout cela ensemble dans la Collectionneuse, et il y a encore autre chose, qui appelle une perception moins consciente : ce ne sont encore que des détails, mais impossibles ceux-là à collectionner, se faufilant entre les vains discours pour imposer une évidence aveuglante. Par exemple, ce sont les attraits d’Haydée Politoff, objets d’un passage en revue qui élude d’avance tous les commentaires ; et c’est une sorte de sous-film où se manifestent sans aucune distance la beauté des corps, le passage de l’instant, la possibilité du bonheur" Alors, on a l’impression que le délire interprétatif des personnages de Rohmer n’est jamais là que pour rehausser une absence : celle d’une jeunesse perdue en bavardages, celle d’une vie qui continue au-delà du cinéma."

D.R.

Francis Moury, dans un article publié sur Cineaste.net, pense qu’"il y a deux lectures possibles du film :

 1) la sublime Haydée Politoff (la conservation du prénom réel " Haydée " signifie un renoncement symbolique à la distance personnage-personne réelle) est une incarnation du concept théologique de la Grâce qui vient troubler le nihilisme philosophique d’Adrien : il est immédiatement " ravi ", tombe malgré lui amoureux d’elle, mais au dernier moment, pêche par orgueil et renonce à son bénéfice pour retrouver une illusoire liberté. Sa liberté n’est pas la liberté volontaire infinie de Descartes qui s’apparente à l’infinité divine elle-même — ce qu’il croit et dit au moment où il revient vers la villa, seul. Haydée laissée sur la route, il ressent un vide mais ne peut plus le combler qu’en prenant l’avion pour Londres où il va retrouver une conquête sans saveur, habituelle pour lui. Ce retour à Londres marque l’échec de la Grâce. C’est précisément parce qu’il ne voulait pas aller à Londres avec sa maîtresse qu’Adrien avait été en mesure de rencontrer Haydée. Il avait en lui-même préparé le terrain, fait le vide pour accueillir une telle venue.

 2) ou bien une lecture profane purement psychologique et sociologique. On est alors en présence d’une comédie discrètement dramatique écrite dans un style qui alternerait Marivaux, le romantisme allemand, les penseurs politiques des années 1960-1965 " révolutionnaires ". On constate alors une impossibilité de l’amour en raison de la liberté même des mœurs qui provoque finalement une incommunicabilité entre les êtres, interchangeables. Aussi une réflexion sur le nihilisme comme fin en soi et l’impossibilité d’y échapper. Enfin le constat brut d’une histoire d’amour naissante puis avortée au parfum mystérieux : Adrien emprunte un moment à " Daniel " (Daniel Pommereulle, cinéaste expérimental de l’époque, assez étonnant comme acteur et parfait contrepoint à " Adrien ", tant physique que psychologique — qui lui aussi garde son vrai prénom dans le film) un volume des Œuvres complètes de Rousseau (gros plan sur la couverture de la Pléiade) tandis qu’un soir Haydée lit…Dracula de Bram Stoker - on reconnaît de loin la belle édition belge Marabout originale car le volume n’est pas filmé de près. Ce qui évoque quelque part une rencontre entre naturel et surnaturel. Haydée ramène chaque soir un jeune homme différent, qui ressort de sa chambre le matin l’air épuisé… métaphore de la séductrice vampirique, entre deux tirades socrato-platoniciennes (le dialogue sur la beauté et la laideur entre Adrien et les deux femmes, avant qu’il ne voie Haydée faire l’amour) ou nietzschéennes (le second prologue présentant la " beauté aux lames de rasoir " crée par Daniel et la discussion sur la nature " tranchante " de l’œuvre d’art, posée combativement sur du néant)…

Entre les deux interprétations, on hésite si on ne sait pas que Rohmer est catholique et que ses films sont imprégnés de problématique théologique. Mais le charme secret du film vient du fait que sachant cela, on hésite pourtant encore… cette description entre l’éloge et le simple constat d’une marginalité luxueuse mais authentiquement philosophique (les deux amis se gaussent, pour notre plus grand plaisir, du jeune abruti matérialiste et ignare ramené par Haydée et finissent même par le chasser d’une manière glacée et comique tout à la fois) " agressée " par le désir pur, brut, obscur qui annihile toute tentative de fuite ou de distance, cette histoire d’amour pointilliste, qui sous des dehors sages maintient un " suspens " constant a tout le charme du cinéma indépendant, proche de l’underground parfois, de l’époque."

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A 20 ans, j’ai rencontré son fils avec qui je travaillais de 5 à 9 heures du matin à faire des revues de presse avant d’aller à l’université. Pourtant, je ne savais pas que Denis était son fils.

Je lisais les Six Contes moraux, rêvant d’écrire comme son père sans savoir non plus qu’il avait d’abord voulu être écrivain.

C’est bien plus tard que j’ai découvert qu’Eric Rohmer, de son vrai nom Maurice Henri Joseph Schérer, a d’abord voulu écrire des livres, avant de se consacrer au cinéma.

Rohmer a d’abord rêvé de faire de ses contes un livre. Il a d’ailleurs publié un premier livre en 1946 Élisabeth.

Rohmer dit sur Elisabeth : « Ce livre a été écrit sous les balles. C’est-à-dire que les balles sifflaient devant ma fenêtre. J’habitais, au moment de la libération de Paris, en août 44, un hôtel du Quartier latin, dans une rue adjacente à la rue Soufflot où se sont produites plusieurs escarmouches. C’est précisément à cette période-là que, bloqué dans ma chambre, n’osant mettre le nez à la vitre, j’écrivais Élisabeth. En même temps, je me posais la question : "Est-il possible d’écrire sur les événements présents ?" Ma réponse était : "Non, on ne peut pas, il faut du recul." Et je n’ai pas changé sur ce point. »

C’est le refus de son éditeur de publier son recueil de nouvelles, les Contes moraux, qui l’a décidé d’en faire un ensemble de films : La Boulangère de Monceau (1962) ; La Carrière de Suzanne (1963) ; La Collectionneuse (1967) ; Ma nuit chez Maud (1969) ; Le Genou de Claire (1970) ; L’Amour, l’après-midi (1972).

Il disait : "Au fond, je ne dis pas, je montre, je montre des gens qui agissent et parlent. C’est tout ce que je sais faire, mais là est mon vrai propos"."

Dernièrement à la question "Au cinéma, ça vous intéresse ? Chez Billy Wilder par exemple ?", il répondait :

"Certains l’aiment chaud est un film que je n’aime pas du tout. Je trouve ça horrible. D’ailleurs, j’ai peu interviewé de gens célèbres dans ma vie, mais il se trouve que j’ai interviewé Buster Keaton. Il était très âgé et le film venait de sortir. Il m’a dit : “Certains l’aiment chaud, c’est exactement ce que je déteste.” Ça m’avait beaucoup amusé."

En un peu plus de 40 ans, Éric Rohmer a réalisé, avec une remarquable constance, près d’une cinquantaine de films.

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P.-S.

Biographie

"Éric Rohmer (de son vrai nom Maurice Henri Joseph Schérer) est né le 4 avril 1920 à Nancy. Il est le frère du philosophe René Schérer.
Il est d’abord professeur de lettres et écrivain. Il publie un roman, Élisabeth, en 1946. Réservé, secret, à partir de 1948, il se tourne de plus en plus vers le cinéma, mais n’abandonne jamais l’écriture.
Il rédige des critiques pour le journal qu’il a fondé, La Gazette du cinéma, et pour les Cahiers du cinéma ; une thèse sur L’organisation de l’espace dans le Faust de Murnau, et plus récemment, une pièce, Le Trio en mi bémol, et un essai, De Mozart en Beethoven, essai sur la notion de profondeur en musique.

Quand il fonde La Gazette du cinéma , il fait la connaissance de Jean-Luc Godard, Jacques Rivette, François Truffaut, ou encore de Claude Chabrol - avec lequel il signe en 1955 un livre sur Alfred Hitchcock.
Ce groupe se dirige d’abord vers la critique, au sein des Cahiers du Cinéma, dont Rohmer devient rédacteur en chef de 1957 à 1963.
Ils vont rapidement fonder ce qui deviendra "la Nouvelle Vague"
En 1959 il réalise son premier long-métrage, Le Signe du lion, sorti sans grand succès trois ans plus tard. En 1962, il crée avec Barbet Schroeder, la société Les Films du Losange, qui produira la majorité de ses films.

La même année, il entame un cycle de six films baptisé Contes Moraux.
En six films, il parcourt toute la gamme du sentiment amoureux, de l’austérité de La Boulangère de Monceau à la sensualité radieuse du Genou de Claire, de l’amertume de Ma nuit chez Maud au parfum de vaudeville de L’Amour l’après-midi.
Ce sont des intrigues sentimentales sur des thèmes chers au cinéaste (la tentation de l’infidélité, l’amour et le hasard, le destin) ainsi que le style qui fera sa marque, entre profondeur raffinement et légèreté. Les dialogues sont souvent sophistiqués et très littéraires.
Sa direction d’acteur est assez épurée et sa mise en scène simple et efficace.
Ma nuit chez Maud (1969), et Le Genou de Claire (1970, Prix Louis-Delluc) sont particulièrement remarqués.
Pendant cette aventure qui dure dix ans ( jusqu’en 1972), Rohmer réalise des émissions littéraires pour la télévision. La série s’intitule « En profil dans le texte », et l’on s’y intéresse à Hugo, Pascal ou La Bruyère. Eric Rohmer apparait rarement à l’écran, mais il fait une exception en 1971 pour Out 1 : Noli me tangere de Jacques Rivette

Les Comédies et Proverbes forment le deuxième grand cycle, où chaque film illustre à sa manière une phrase tirée de la sagesse populaire.
Dans cette série, Le Rayon vert (1986), film en partie improvisé, obtient le Lion d’Or à Venise

Les années 90 sont marqués par les Contes des quatre saisons, dans lesquels le cinéaste poursuit son exploration des jeux et des hasards amoureux.
Simultanément, il réalise des films hors de ses séries, comme les Quatre Aventures de Reinette et Mirabelle (1987).

Rohmer est un exemple parfait du cinéma d’auteur à la française, en écrivant seul ses scénarios, qu’il soient originaux ou adaptés œuvres littéraires comme La Marquise d’O (1976) ou Perceval le Gallois (1978).
Il choisit souvent de jeunes comédiens inconnus, mais fait aussi appel à des acteurs confirmés, comme Jean-Louis Trintignant (Ma nuit chez Maud, 1969) ou André Dussollier (Le Beau Mariage, 1982)
Éric Rohmer a révélé Arielle Dombasle, Pascal Greggory et Fabrice Luchini, qui sont devenus de grands acteurs du cinéma français."

Source : http://nezumi.dumousseau.free.fr/rohmer.htm

Mes dates clés, par Eric Rohmer

""1920. Naissance à Tulle (Corrèze).

1925-30. Vois un seul film (muet) : Ben Hur.

1930-37. Vois deux films (parlants) : l’Aiglon et Tartarin de Tarascon.

1937-39. Khâgneux à Henri-IV. Fréquente le Studio des Ursulines.

1945. Fréquente la Cinémathèque. Y découvre les maîtres du muet : Griffith, Lang, Murnau, Eisenstein, Chaplin, Buster Keaton...

1946. Ecris pour la Revue du cinéma : « Le cinéma, art de l’espace ».

1947-51. Dirige les débats au ciné-club du Quartier Latin. Y rencontre Chabrol, Godard, Rivette et Truffaut. Fais la connaissance d’Alexandre Astruc et d’André Bazin. Participe avec eux à la création du ciné-club Objectif 49 et des Cahiers du cinéma.

Ayant échoué deux fois à l’oral de l’agrégation de lettres, dois accepter un poste en province (Vierzon), mais continue à résider à Paris.

1952-56. Peux ainsi poursuivre mon activité journalistique aux Cahiers et à l’hebdomadaire Arts. Grâce à des amis qui me prêtent leur caméra et me donnent de la pellicule, tourne en 16 mm muet Bérénice d’après Edgar Poe, et la Sonate à Kreutzer d’après Tolstoï, l’un et l’autre en costumes modernes.

Un congé pour raison de convenance personnelle m’est accordé par l’Education nationale.

1957-62. Deviens rédacteur en chef des Cahiers du cinéma, puis, grâce à Chabrol, tourne le Signe du lion en juillet 1959. Mon film n’ayant pas connu le succès des Quatre Cents Coups, du Beau Serge et d’A bout de souffle, dois retourner à l’amateurisme. Entreprends en 16 mm, avec une caméra à ressort, le tournage du premier film de la série des Six Contes moraux, la Boulangère de Monceau. Le personnage principal y est interprété par un jeune cinéphile, Barbet Schroeder, qui va fonder une société de production pour soutenir mes films : les Films du Losange.

1963. Quitte les Cahiers et entre à la Télévision scolaire où je tourne, en toute indépendance, grâce au directeur Georges Gaudu, des émissions qui ne sont pas seulement alimentaires.

1966. Après le tournage amateur du deuxième conte, la Carrière de Suzanne, cherche à réaliser professionnellement le troisième. L’avance sur recettes m’est refusée. Tourne alors le quatrième, la Collectionneuse, encore en amateur, mais sur pellicule 35 mm couleur et avec un opérateur promis à une carrière brève, mais prestigieuse, Nestor Almendros. Succès encourageant.

1967. Représente sous un nouveau titre, Ma Nuit chez Maud, le troisième conte à l’avance sur recettes. Nouveau refus.

1968-69. Heureusement, grâce à Truffaut, qui convainc quelques-uns de ses confrères (Pierre Braunberger, Claude Berri, Yves Robert), les Films du Losange peuvent monter une coproduction. Succès au-delà de toute espérance en France et à l’étranger.

1970. Pierre Cottrell, qui dirige le Losange en l’absence de Barbet Schroeder en tournage, obtient de la Warner-Columbia le financement des deux derniers Contes moraux : le Genou de Claire et l’Amour l’après-midi. Double succès.

1973. Dans l’attente d’une nouvelle inspiration, réalise à la télévision quatre émissions sur les villes nouvelles.

1975. Tourne en Allemagne, et en allemand, La Marquise d’O. d’Heinrich von Kleist.

1976. Perceval ne sera pas facile à monter. Néanmoins, la nouvelle directrice du Losange, Margaret Menegoz, saura décrocher à la fois l’avance sur recettes et une coproduction télévisuelle européenne. Succès médiocre.

1980. Retour au demi-amateurisme avec la Femme de l’aviateur, en 16 mm, premier d’une nouvelle série, Comédies et Proverbes (le Beau Mariage, Pauline à la plage, les Nuits de la pleine lune, le Rayon vert, l’Ami de mon amie). Fonde ma propre société de production, la Compagnie Eric Rohmer (C.E.R.), qui sera coproductrice des films ultérieurs, avec le Losange et parfois seule. Quatre aventures de Reinette et Mirabelle (1985), l’Arbre, le Maire et la Médiathèque (1992), les Rendez-vous de Paris (1994).

1989-97. Nouvelle série : Contes des quatre saisons. Dans cette dernière décennie, tout ira comme sur des roulettes.

2000-2003. Les difficultés reviendront avec deux films « en costume » l’Anglaise et le Duc (2000) et Triple Agent (2003). Leur poids étant trop lourd pour le Losange ­ d’autant que l’avance sur recettes leur a été refusée ­ Françoise Etchegaray et moi faisons appel à Pathé et à Rezo Films.

2004. Toujours pas inscrit par les syndicats professionnels sur leurs listes de référence. Bientôt 84 ans. Eternel amateur."

Source : Libération : 17/03/2004

4 Messages

  • Eric Rohmer, Claire, et la collectionneuse 11 janvier 2010 21:43, par Aliette G. Certhoux

    Merci beaucoup pour cet article très émouvant, immédiatement écrit et nourri de sources

  • Moi aussi j’étais amoureux d’Haydée. la collectionneuse est le premier Rhomer que j’ai vu. et mon préféré. j’y avais rien vu de ce que vous décrivez. Ca m’a pas empêché d’adorer ce film. la filmographie de Rhomer c’est 25 ans de ma vie qui défile sous mes yeux. 25 ans de bonheur...

  • Chroniques rohmériennes revisitées 13 janvier 2010 00:33, par Francis Moury

    Je vous remercie de m’avoir aimablement lu et cité dans votre notice nécrologique de Rohmer, nourrie de belles anecdotes qui manifestent une relation intime au cinéaste et à son oeuvre.

    J’avais chroniqué vers 2002-2003 la sortie successive en DVD des CONTES MORAUX et des COMEDIES ET PROVERBES.

    Les critiques étaient parus initialement vers 2002 sur Dvdrama.com devenu aujourd’hui Excessif.com dans le cadre de tests techniques contenant une section critique ou "avis artistique".

    Ils avaient été ensuite repris en pure version Word, sans aucune capture ni illustration, mais en version parfois revue et corrigée sur Cinéastes.net.

    Certains d’entre eux furent ensuite à nouveau réédités sur Stalker-Dissection du cadavre de la littérature.

    Je vous annonce que l’ensemble reparaît actuellement (dans le cadre d’un hommage désormais posthume mais qui était prévu depuis quelques semaines) et que vous pourrez en lire parfois des versions à nouveau corrigées et occasionnellement augmentées, sur le même site Stalker-Dissection du cadavre de la littérature.

    Les fiches techniques sont allégées mais la section critique est parfois augmentée.

    Enfin une correction immédiate d’une coquille qui m’avait échappé, dans l’extrait que vous avez cité.

    J’ai écrit :
    "(...) la conservation du prénom réel " Haydée " signifie un renoncement symbolique de la distance personnage-personne réelle (...)"

    Il faut bien entendu lire :
    "(...) un renoncement symbolique à la distance (...)"

    Bien cordialement et bien rohmériennement vôtre

    Francis Moury

    • Chroniques rohmériennes revisitées 13 janvier 2010 11:24, par Robin Hunzinger

      Meri pour ses précisions. Nous ne manquerons pas de faire part de la publication que vous annoncez !

      La coquille est corrigée.

      Cordialement,

      Robin Hunzinger

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