"Ch’oe Yun, née en 1953, est l’une des rares à affronter le réalisme et son fils indigne, l’héroïsme, dans un pays où le devoir de témoigner est un devoir moral. Elle débute avec Chôgi sori ôbsi hanjôm kkôt’ip’i / Là-bas sans bruit tombe un pétale, en 1983, sur le massacre de Kwangju, qui lui vaut à la fois reconnaissance, rejet des partisans du réalisme et hostilité des militants qui voient en elle une étrangère à la région. Il faut dire que jamais l’existence de son héroïne n’est attestée, cette petite fille qui a disparu parce qu’elle se reprochait d’avoir abandonné sa mère en pleine manifestation. Mais son trajet improbable dans le pays est celui-la même de la rumeur. C’est là où le formalisme moderne revivifie le réalisme, frôlant le meilleur de la littérature coréenne (Abôji kamchi / Il surveille son père, Hoesaek nunsaram / Avec cette neige grise et sale, 1992). Ses textes sont aussi bien des exercices de style (Sup’esô sup’ûro / De la forêt à la forêt, 1994) que des réflexions politiques, auxquels répugnent la plupart des écrivains femmes. Mais, aujourd’hui, elle est franchement engluée, comme beaucoup, dans le cléricalisme, qui n’interdit pas la carrière institutionnelle à l’université et dans les revues."
(extrait de Histoire de la Littérature coréenne, éditions Ellipses)