On s’est moqué de moi, on a ri, on a hurlé lorsque après le 11 septembre j’ai accusé les surréalistes et André Breton leur chef de file d’avoir été les premiers terroristes de la modernité et d’avoir préfiguré le 11 septembre en rayant de leur atlas du monde de 1929 les Etats-Unis. N’avais-je pas cité les déclarations prémonitoires d’Aragon : "Nous ruinerons cette civilisation qui vous est chère... Monde occidental tu es condamné à mort. Nous sommes les défaitistes de l’Europe... Voyez comme cette terre est sèche et bonne pour tous les incendies." "Que les trafiquants de drogue se jettent sur nos pays terrifiés. Que l’Amérique au loin croule de ses buildings blancs..." (La Révolution surréaliste, n° 4, 1925). Et n’avais-je pas dévoilé derrière le pape du surréalisme la figure de Ben Laden parce qu’il avait osé écrire : " L’acte surréaliste le plus simple consiste, revolvers aux poings, à descendre dans la rue et à tirer au hasard, tant qu’on peut dans la foule. Qui n’a pas eu, au moins une fois, envie d’en finir de la sorte avec le petit système d’avilissement et de crétinisation en vigueur a sa place toute marquée dans cette foule, ventre à hauteur de canon. " (Manifeste du Surréalisme, 1924).
Or j’ai aujourd’hui la preuve qu’il n’était pas tout seul dans le coup et que l’attentat du Word Trade Center avait été effectivement programmé par les poètes modernes et anarchistes dès les années 20 ! Ainsi on peut lire sous la plume d’un certain Henry (sic) Michaux en 1926 un texte intitulé : " Révélations sur l’homme qui s’est jeté du soixante-deuxième étage de Kree-Kastel à Broadway et qui s’appelait Benson ". Bon, d’accord, le Word Trade Center n’existait pas à l’époque, mais il devait bien y avoir un Benson parmi les 3000 victimes dont plusieurs défenestrés du 11 septembre 2001. Tout le texte est une évidente préméditation démoniaque de l’attentat et associe Michaux au complot anarchico-surréaliste qui pourrait mener l’Occident à sa ruine si personne ne réagit !
Lisez vous-même !
" Il est mort de saisissement.
C’était un lâche. Au moment que déjà il tombait, seulement alors il eut peur, en voyant l’énorme espace au-dessous de lui. Le corps seul tombe. Lui, Benson se retient, reste sur place à peu près à la hauteur du cinquante-neuvième étage ou entre le cinquante-neuvième et le soixantième et regarde le corps qui descend, descend, est descendu et s’épanouit en morceaux. Alors, lentement Benson (l’âme de Benson) commence à descendre, voit son corps de près et qu’il n’est plus habitable ; il se met à regarder l’attroupement d’un air gêné, le policeman qui écrit sur son calepin et les personnes qui s’en vont avec une histoire de plus à raconter chez eux ce soir-là.
Oui, Benson est un lâche. Mais il faut une incroyable force de volonté quand on tombe pour rester quand même dans son corps, malgré le prochain écrasement des tissus.
Oh ! oh ! une prodigieuse force de volonté ! "
Le cynisme et le nihilisme de l’auteur ne laissent-t-ils pas présager ce qui devait se produire 75 ans plus tard ? La prose fantastique de Michaux n’est-elle pas l’expression exacerbée du fantasme qui habite la génération surréaliste ? Michaux et les surréalistes ne rêvaient-ils pas de voir tout le peuple américain défenestré dans une inoubliable catastrophe ? Comment ne pas voir dans ces lignes passablement anarchico-terroristes ce qui a pris corps devant nous, je veux dire corps en chute de dizaine de Benson " lâches " devant un parterre de Beigbeder " qui s’en vont avec une histoire de plus à raconter chez eux ce soir-là ", pour en faire le plus sinistre best-seller de l’Histoire ?