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6 mai 2023, par Elisabeth Poulet,
Thierry Galibert
« Si l’on admet – ce que pense Artaud – que les Occidentaux sont tous aliénés, et les intellectuels au moins autant sinon plus que le commun des mortels, alors, non seulement Artaud n’avait aucune raison d’être exclu de la société, mais il aurait dû servir de modèle à tous ceux qui s’expriment par la pensée. Sa situation est donc suicidaire, et si elle l’est c’est surtout à cause du diagnostic (…)
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9 octobre 2008, par Elisabeth Poulet
L’existence individuelle ne se déroule pas en ligne droite, elle avance au contraire par écarts et discontinuités. Au cours de sa vie, chacun expérimente diverses versions de soi-même et ressemble à un palimpseste continuellement recouvert de nouvelles strates. Se connaître et se comprendre soi-même, pour autant que ce soit possible, veut dire disloquer et partager le poids du passé en le (…)
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11 décembre 2008, par Elisabeth Poulet
« Le rêve est la pire des cocaïnes, parce que c’est la plus naturelle de toutes. Elle se glisse dans nos habitudes avec plus de facilité qu’aucune autre, on l’essaye sans le vouloir, comme un poison pris sans méfiance. Elle n’est pas douloureuse, elle ne cause ni pâleur ni abattement – mais l’âme qui fait usage du rêve devient incurable, car elle ne peut plus se passer de son poison, qui n’est (…)
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2 octobre 2006, par Elisabeth Poulet
Pessoa, poète multiple
Fernando Pessoa a toujours souffert de ne pas se sentir être. Pour lui, ce n’est pas seulement la vraie vie qui est absente, mais toute vie est absence. Il faut donc rendre visible, sensible, cette absence ontologique. A la base de chaque être, il existe un principe d’incomplétude. L’être, insuffisant, a besoin d’un autre. L’individu cherche, non pas à être reconnu, (…)
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6 mai 2013, par Elisabeth Poulet
Marguerite Duras n’existe pas. N’en déplaise à ceux qui lui reprochaient un ego démesuré, Marguerite Duras n’était pas dans le réel, seuls ses personnages sont vrais :
« L’histoire de ma vie, de votre vie, elle n’existe pas, ou bien alors il s’agit de lexicologie. Le roman de ma vie, de nos vies, oui, mais pas l’histoire. C’est dans la reprise des temps par l’imaginaire que le souffle est (…)
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19 mai 2014, par Elisabeth Poulet
L’incarnation manquée de Jésus-Christ
En dépit de ses nombreuses incarnations (Héliogabale ou Jésus-Christ), Antonin Artaud a échoué dans ce qui fut l’entreprise de toute sa vie : se faire un corps. Il n’est pas inutile de rappeler ici qu’en tant que Jésus-Christ, c’est-à-dire en tant qu’incarnation du Christ, Artaud n’a pas obtenu satisfaction. Nous préférons le terme d’incarnation à celui (…)
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28 février 2022, par Elisabeth Poulet
Toute sa vie, et spécialement durant les années qui précédèrent son internement, Antonin Artaud n’a cessé de réfléchir à la question de l’énonciation et de son sujet dans le théâtre occidental, celle du théâtre et de son double. C’est dans cette question qu’il a trouvé comme la réalisation plastique et physique sur « le terrain organique de la scène », « l’expression dynamique et dans l’espace (…)
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7 novembre 2011, par Elisabeth Poulet
Dans le TGV Paris-Londres, un homme obèse et sans-gêne, « un gaillard énorme vêtu d’un manteau poil de chameau flambant neuf assez ample pour contenir l’animal tout entier » aborde une jeune femme. On pense immédiatement que ce type est un malotru et un dragueur qui ne doute de rien. Force est de constater qu’il n’est pas banal d’évoquer le général prussien Clausewitz (dont les citations (…)
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9 mars 2006, par Elisabeth Poulet
Dès le début de sa correspondance avec Jacques Rivière, Antonin Artaud précise qu’il n’entend pas produire une oeuvre et qu’il s’agit de dissiper au plus vite les éventuels malentendus à ce sujet. S’il écrit, c’est pour serrer au plus près une forme où il pourrait se faire reconnaître et donc se reconnaître. C’est pourquoi il présente, de façon très insistante dans ses lettres, cette quête de (…)
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24 mai 2010, par Elisabeth Poulet
Marc Lecas est un flegmatique. Il a toujours été d’un naturel accommodant, un homme doux et calme qui avait pour habitude de laisser les autres choisir pour lui jusqu’au jour où il fit l’expérience du pont, accoudé à la rambarde qui surplombait l’autoroute, là où « la tête se vidait rapidement de toute pensée » et où l’on parvenait « à une sorte de stupeur méditative que le flux des véhicules (…)